
Alors que la fiscalité automobile ne cesse de se complexifier et de s’alourdir en France, une nouvelle mesure fait bondir les associations de défense des droits des personnes en situation de handicap. À partir du 1er janvier prochain, un malus rétroactif s’appliquera à certaines voitures d’occasion. Et si cette disposition ne concerne qu’un nombre restreint de véhicules, elle risque d’avoir un impact disproportionné sur une population déjà fragilisée.
Une mesure mal comprise… mais bien réelle
Lors de l’annonce initiale de cette réforme, de nombreux observateurs ont cru à tort que toutes les voitures d’occasion allaient être soumises à un malus écologique, même rétroactivement. Une idée qui a suscité un tollé sur les réseaux sociaux. En réalité, la mesure cible uniquement certains cas particuliers : les véhicules n’ayant pas été soumis à un malus lors de leur première immatriculation. C’est le cas, notamment, des voitures acquises par des diplomates, mais surtout de celles achetées par des personnes en situation de handicap bénéficiant d’exonérations spécifiques.
Ce malus ne concernera donc pas la majorité des véhicules d’occasion. Cependant, son application à une catégorie aussi spécifique et vulnérable soulève de nombreuses questions d’ordre éthique et social.
Un dispositif qui pénalise les vendeurs handicapés
La nouvelle règle prévoit que, lors de la revente d’un véhicule de moins de dix ans qui avait été initialement exonéré de malus, un malus sera cette fois appliqué, même si la voiture a déjà roulé plusieurs années. Le montant sera certes dégressif selon l’âge et le kilométrage du véhicule, mais il représentera tout de même une charge non négligeable pour l’acheteur. Résultat : les vendeurs handicapés, jusqu’ici protégés par des exonérations à l’achat, verront leur capacité à revendre leur voiture s’effondrer.
« Le véhicule, pour de nombreuses personnes en situation de handicap, n’est pas un luxe mais une nécessité vitale. Il garantit leur mobilité, leur autonomie et parfois même leur insertion sociale ou professionnelle », alerte la FNATH (Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés). En rendant la revente de ces véhicules plus difficile, l’État impose indirectement un nouveau coût à une population déjà confrontée à de multiples obstacles.
Un manque d’écoute des associations
Malgré les multiples avertissements et demandes de retrait de cette disposition, le gouvernement a maintenu le malus rétroactif dans le cadre du vote du budget. L’amendement est donc entériné et s’appliquera dès le 1er janvier 2026. Pour la FNATH, cette décision est incompréhensible : « Porter atteinte à la valeur de revente d’un véhicule qui a déjà bénéficié d’un abattement pour des raisons de handicap revient à nier les besoins spécifiques de ces personnes. »
D’un point de vue fiscal, cette taxe ne devrait pourtant rapporter que très peu à l’État. Le nombre de véhicules concernés étant limité, les recettes potentielles resteront marginales. Ce qui renforce le sentiment d’injustice et d’acharnement fiscal ressenti par les principaux concernés.
Une pression sociale croissante sur le gouvernement
Face à la polémique, certains parlementaires envisagent déjà de proposer un amendement ou un décret pour corriger le tir. Il s’agirait, dans l’idéal, d’exempter explicitement les personnes en situation de handicap de ce malus à la revente, ou de maintenir l’exonération sur toute la durée de vie du véhicule. Une telle clarification permettrait d’éviter que cette mesure ne vienne amplifier les inégalités déjà existantes.
Mais pour l’heure, aucune annonce officielle n’a été faite en ce sens. Et sans geste fort de la part des pouvoirs publics, cette nouvelle mesure pourrait devenir un symbole de la déconnexion entre les réalités vécues par les personnes handicapées et les décisions prises dans les hautes sphères de l’administration fiscale.
Une fiscalité automobile de plus en plus contestée
Ce malus rétroactif s’ajoute à une série de mesures fiscales qui complexifient considérablement l’achat, la revente et l’usage de véhicules en France. Entre le malus CO₂, le malus au poids, et les zones à faibles émissions (ZFE), de nombreux Français peinent à suivre l’évolution des règles et à anticiper les coûts.
Dans ce contexte, la taxation rétroactive de certains véhicules d’occasion apparaît comme une ligne rouge franchie, notamment lorsqu’elle touche des populations pour qui le véhicule personnel n’est pas un choix, mais une nécessité.