Fin des moteurs à Douvrin : Stellantis tourne la page thermique pour passer à l’électrique
C’est une page qui se tourne pour l’automobile française. À Douvrin, dans le Pas-de-Calais, l’usine de moteurs autrefois pilier de la production thermique tricolore va définitivement passer le relais à l’électrique. Stellantis, qui regroupe des marques telles que Peugeot, Citroën, Opel ou Fiat, a acté l’arrêt progressif de deux moteurs majeurs produits sur place, annonçant ainsi la fin du diesel et de l’essence sur ce site historique.
La fin d’un cycle industriel
Fondée en 1969 sous le nom de Française de Mécanique, l’usine de Douvrin est longtemps restée un fleuron de la production de moteurs en France. En 55 années d’activité, plus de 40 millions de blocs ont été assemblés sur place, dont le mythique V6 PRV, monté notamment sur la Peugeot 504 Coupé, la Renault 25 ou encore la célèbre DeLorean DMC-12.
Mais les temps ont changé, et l’avènement de la motorisation électrique redessine les priorités industrielles. Le 24 juillet, lors d’un comité social extraordinaire, Stellantis a annoncé officiellement la fin de la production des moteurs diesel 1.5 BlueHDi dès le 1er novembre 2025, suivie courant 2026 par l’arrêt du moteur essence 1.2 PureTech. Ces deux blocs équipaient encore nombre de véhicules compacts et utilitaires du groupe, comme la Peugeot 208, la 308, la Citroën C3 Aircross ou l’Opel Grandland.
Le basculement est donc désormais clair. Ce qui avait été pressenti dès 2021 devient réalité : Douvrin ne produira plus de moteurs thermiques, laissant la place à une nouvelle ère technologique.
Une reconversion stratégique déjà bien entamée
Le site de Douvrin n’est pas abandonné pour autant. Stellantis a anticipé cette transformation en implantant la toute première gigafactory française à proximité immédiate de l’usine. Cette unité de production de batteries est opérée par ACC (Automotive Cells Company), coentreprise formée avec Saft (filiale de TotalEnergies) et Mercedes-Benz.
Dès 2023, 330 salariés de l’usine thermique ont été transférés vers ACC. Les 370 restants seront également reclassés, soit dans la filière électrique, soit sur d’autres sites du groupe comme Valenciennes ou Hordain. Un plan de mobilité assorti de primes est prévu pour accompagner ces changements.
Ce processus illustre l’ambition de Stellantis d’orchestrer une transition sans rupture brutale. L’idée est claire : réorienter les compétences acquises dans le thermique vers les métiers d’avenir liés à l’électrification.

L’électrique prend le pouvoir
Avec cette mutation, Douvrin devient un pilier de la stratégie bas-carbone du groupe. C’est ici que sont produites les batteries de 97 kWh du tout nouveau Citroën ë-C5 Aircross, assemblé à Rennes. Le site accueillera également une deuxième ligne de production de batteries dans les prochains mois, preuve de l’accélération de la dynamique.
Cette réorganisation s’inscrit dans une politique d’investissement massive. En cinq ans, Stellantis affirme avoir injecté trois milliards d’euros dans ses sites français pour préparer la montée en puissance de l’électrique. Le cap est désormais fixé : atteindre des capacités de production compétitives pour répondre à la demande croissante de véhicules à zéro émission.
Des syndicats vigilants face à la fermeture
Malgré les annonces rassurantes, les syndicats restent vigilants. Pour la CGT et la CFE-CGC, la fin annoncée de la production thermique d’ici 2026 reste un choc symbolique et social. Ils réclament des garanties supplémentaires pour les salariés, notamment sur le long terme, afin d’éviter toute précarisation liée à la reconversion.
La fermeture progressive de Douvrin dans sa forme actuelle incarne en effet un basculement historique. Pendant plus d’un demi-siècle, ce site a représenté une certaine idée de l’industrie automobile française : puissante, exportatrice et largement fondée sur le thermique.
Aujourd’hui, les lignes bougent. L’âge d’or du diesel est terminé, et avec lui, un pan entier de savoir-faire se réinvente. L’électrique, longtemps perçu comme marginal, s’impose comme la nouvelle norme. Pour Stellantis, il ne s’agit plus seulement d’anticiper le changement, mais de le piloter. Quant aux ouvriers de Douvrin, ils sont désormais les artisans d’une mutation majeure, celle d’une industrie qui tente de conjuguer histoire, transition écologique et souveraineté industrielle.
