Ebro signe son grand retour en Europe : le SUV espagnol qui bouscule MG et les marques chinoises
Disparue depuis plus de trois décennies, la marque automobile espagnole Ebro refait surface en 2024 avec l’ambition claire de secouer le marché européen des SUV. Portée par le géant chinois Chery, elle propose aujourd’hui une gamme complète de véhicules thermiques, hybrides et hybrides rechargeables, produits en Espagne dans une ancienne usine Nissan. Un retour inattendu, mais stratégique, à l’heure où l’Europe cherche à équilibrer production locale et électrification progressive.
Une marque au passé industriel solide
Fondée en 1954, Ebro s’est d’abord imposée comme un fabricant de poids lourds et de véhicules utilitaires. Dans les années 1980, la marque passe sous le contrôle de Nissan, qui finit par la faire disparaître au profit de ses propres modèles. La dernière apparition d’Ebro remonte à 1987, avant une éclipse de plus de trente ans.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là. En 2020, Nissan ferme son site de production historique à Barcelone, qui fabriquait notamment le pick-up Navara et le fourgon NV200. Ce site stratégique cherchait un repreneur, et c’est finalement le chinois Chery, via un partenariat avec EV Motors, qui reprend les rênes.
Une renaissance orchestrée par Chery
Déjà présent en Europe via ses marques Omoda et Jaecoo, Chery poursuit sa stratégie de pénétration du marché européen en utilisant la marque Ebro comme cheval de Troie. L’idée est simple : profiter de la notoriété locale du nom Ebro pour mieux vendre des modèles déjà éprouvés en Chine, mais fabriqués localement, ce qui constitue un atout majeur face aux concurrents asiatiques encore tributaires de l’importation.
Avec cette renaissance, Chery transforme l’ancienne usine Nissan de Barcelone en un nouveau centre de production pour ses SUV. Et plutôt que d’utiliser le nom “Chery”, peu connu et peu vendeur en Europe, le groupe mise sur des marques locales ou spécifiques à chaque marché, comme c’est déjà le cas en Italie avec DR Automobiles.
Trois SUV pour concurrencer MG
La gamme actuelle d’Ebro comprend trois modèles clairement positionnés pour concurrencer MG, autre marque chinoise qui cartonne en Europe grâce à son bon rapport prix/prestations. Les Ebro S400, S700 et S800 sont en réalité des clones des Chery Tiggo 2, 7 et 8, mais habillés d’un badge espagnol et produits localement.
- Ebro S400 : un SUV compact de segment B, destiné aux citadins.
- Ebro S700 : un SUV de segment C, cœur du marché familial, proposé à partir de 27 900 euros.
- Ebro S800 : un modèle plus haut de gamme, concurrent des SUV familiaux de segment D.
Contrairement à de nombreuses marques chinoises qui misent tout sur l’électrique, Ebro propose des motorisations thermiques et hybrides rechargeables, un choix stratégique pour séduire une clientèle encore attachée à la polyvalence des carburants traditionnels.
Une fabrication locale pour une carte européenne
Ce qui distingue Ebro de nombreux autres concurrents asiatiques, c’est sa capacité à produire directement sur le sol européen. Cette production locale pourrait bien devenir l’élément clé de son succès, notamment en France, où les véhicules assemblés en Europe bénéficient potentiellement du bonus écologique.
Avec déjà 60 points de vente en Espagne, Ebro affiche des ambitions claires : produire jusqu’à 20 000 véhicules par an d’ici 2030. Une telle capacité nécessitera sans doute une expansion sur d’autres marchés européens, dont la France.
Le cas français semble d’autant plus pertinent que le marché hexagonal a récemment ouvert ses portes à plusieurs marques chinoises, comme MG, BYD, Leapmotor ou encore Seres. L’arrivée d’Ebro, une « chinoise déguisée en espagnole », pourrait faciliter l’acceptabilité auprès du grand public, tout en réduisant les barrières douanières et fiscales grâce à sa production intra-européenne.
Un pari stratégique dans un marché en mutation
Dans un contexte où les constructeurs européens perdent du terrain face à l’offensive asiatique, Ebro représente un exemple de relocalisation intelligente. Chery, en ressuscitant une marque locale oubliée et en l’installant dans une usine déjà opérationnelle, réduit ses coûts logistiques, séduit les consommateurs européens avec un nom familier, et évite les taxes à l’import.
En somme, Ebro incarne une nouvelle génération de marques automobiles hybrides, à la fois chinoises par la technologie et les capitaux, mais européennes par leur stratégie industrielle. Un modèle que d’autres pourraient bientôt suivre.
Et la France dans tout ça ?
Si rien n’est encore officiellement annoncé, l’arrivée d’Ebro en France semble plausible. Le marché est mûr pour accueillir une nouvelle offre à mi-chemin entre prix attractif, qualité perçue et production européenne. Avec son S700 proposé à un tarif inférieur à celui d’un MG HS équivalent, Ebro pourrait vite se faire une place dans les concessions françaises.
Il faudra cependant suivre l’évolution du réseau de distribution, la disponibilité des pièces détachées, et l’accueil du public. Mais une chose est sûre : Ebro n’est pas une lubie passagère. C’est un plan structuré, soutenu par un géant chinois, avec une ambition claire : s’imposer durablement dans le paysage automobile européen.
