Chine : la conduite à une pédale bientôt interdite par défaut sur les voitures électriques dès 2027
La Chine poursuit son offensive réglementaire dans l’univers de la voiture électrique. Après avoir sévi sur les fonctionnalités de conduite autonome, Pékin s’attaque désormais à une autre innovation phare du secteur : la conduite à une pédale, ou « one pedal driving ». Dès 2027, cette fonctionnalité ne pourra plus être activée par défaut sur les modèles vendus en Chine. Tesla, Renault, Hyundai, et tous les autres constructeurs devront s’y conformer. Objectif : améliorer la sécurité routière et responsabiliser les conducteurs face à des technologies qui, bien que pratiques, peuvent aussi générer des comportements à risque.
Le freinage régénératif : une révolution dans la conduite électrique
Apparu il y a plus d’une décennie sur la Nissan Leaf, le freinage régénératif a depuis conquis la majorité des modèles électriques. Son principe est simple mais ingénieux : chaque décélération transforme l’énergie cinétique du véhicule en électricité, grâce au moteur électrique utilisé comme génératrice. Cette énergie est ensuite stockée dans la batterie, augmentant ainsi l’autonomie du véhicule et limitant l’usure des freins mécaniques.
De ce principe est née la « conduite à une pédale », qui permet de moduler vitesse et décélération simplement en jouant avec la pédale d’accélérateur. En relâchant cette dernière, le véhicule ralentit fortement, voire s’arrête complètement, sans que le conducteur ait besoin de toucher la pédale de frein.
Tesla a largement contribué à populariser cette technologie, suivie par de nombreuses marques comme Renault (Mégane E-Tech, R5 E-Tech), BMW (i3, iX), Mercedes (EQC, EQA), Hyundai (Ioniq 5, Kona), Kia (EV6), Xpeng ou encore MG. La plupart proposent même différents niveaux de régénération ajustables selon les préférences du conducteur.
Une efficacité contestée sur le plan de la sécurité
Mais si la conduite à une pédale séduit par sa simplicité, elle pose aussi de nouveaux défis en matière de sécurité routière. En Chine, les autorités ont observé des comportements problématiques, en particulier lors de situations d’urgence. À force de tout contrôler via la pédale d’accélérateur, certains conducteurs perdraient le réflexe de freiner rapidement en cas de besoin, retardant ainsi leur réaction de précieuses fractions de seconde.
Autre problème : lors d’une forte décélération par régénération, les feux stop ne s’allument pas toujours, rendant le freinage invisible pour les véhicules suiveurs. Résultat : des risques accrus de collisions par l’arrière, notamment dans le trafic dense ou sur autoroute.
Enfin, la généralisation de cette technologie n’a pas été accompagnée d’une homogénéisation de son comportement d’un constructeur à l’autre. Certains véhicules s’arrêtent complètement quand d’autres ne font que ralentir, rendant la prise en main délicate pour un conducteur non averti ou en cas de véhicule partagé.
Une nouvelle norme pour encadrer la pratique
Face à ces constats, la Chine a décidé de légiférer en introduisant une nouvelle norme nationale : la GB 21670-2025. Son application se fera en deux temps : dès janvier 2026 pour les nouveaux modèles, puis à partir de janvier 2027 pour tous les véhicules déjà homologués.
Voici les principales mesures de cette réglementation :
- Le mode « one pedal » ne pourra plus être activé par défaut au démarrage du véhicule**. Le conducteur devra faire la démarche volontaire d’activer cette fonction, évitant ainsi les surprises pour les conducteurs non familiarisés.
- Les feux stop devront obligatoirement s’allumer dès que la décélération régénérative dépasse 1,3 m/s², et rester activés aussi longtemps que la voiture ralentit. Ce seuil, désormais clairement défini, devrait améliorer la lisibilité des intentions du conducteur pour les autres usagers.
- L’ABS devient obligatoire sur tous les nouveaux véhicules de tourisme, une exigence déjà acquise en Europe mais encore inégale en Chine, notamment sur les modèles d’entrée de gamme.
Une réponse à un contexte de vigilance renforcée
Cette mesure fait écho à une série d’autres décisions prises récemment par les autorités chinoises. L’interdiction de certaines fonctions de conduite autonome (comme le stationnement automatisé sans conducteur ou l’appel à distance du véhicule) et le durcissement des normes sur les batteries électriques (avec le mot d’ordre « pas d’incendie, pas d’explosion ») illustrent une volonté ferme : encadrer l’innovation technologique sans compromettre la sécurité des usagers.
Un accident mortel impliquant une Xiaomi SU7 a d’ailleurs précipité ces changements, rappelant que les progrès technologiques doivent toujours s’accompagner d’une réflexion sur les usages et les risques induits.
Un tournant qui pourrait faire école
Si la Chine est le premier pays à légiférer spécifiquement sur la conduite à une pédale, cette décision pourrait inspirer d’autres marchés. L’Union européenne et les États-Unis surveillent de près l’évolution de la sécurité liée aux nouvelles mobilités électriques. À l’heure où les véhicules autonomes, les assistants de conduite et les modes alternatifs de freinage se généralisent, la nécessité de garantir des standards communs devient pressante.
En imposant un encadrement clair du « one pedal driving », Pékin veut éviter que la simplicité ne se transforme en négligence. Une piqûre de rappel utile dans un secteur où l’innovation va toujours plus vite que la réglementation.
