Airbags Takata : des milliers de voitures dangereuses toujours en circulation en France
Malgré des campagnes de rappel massives, des milliers de voitures équipées des airbags Takata défectueux circulent encore sur les routes françaises. Ce problème, qui dure depuis des années, met en évidence les failles du système de suivi des véhicules et le manque de réactivité de certains automobilistes. Alors que le danger de ces airbags, pouvant exploser et blesser gravement les occupants, est bien connu, le rythme du remplacement reste préoccupant.
Des données alarmantes sur le suivi des véhicules
Lors d’une conférence organisée par l’Inspection générale de l’Environnement et du Développement durable (IGEDD), les ingénieurs chargés de l’enquête ont dressé un constat inquiétant. Sur les 2,5 millions de véhicules concernés par les airbags Takata en France, seulement 1,7 million ont été rappelés. Cela signifie qu’un nombre important de voitures potentiellement mortelles circulent toujours.
La principale difficulté réside dans le fichier SIV (Système d’immatriculation des véhicules) censé centraliser toutes les données. Les informations sont souvent obsolètes, notamment les adresses postales. Il devient alors impossible de joindre les propriétaires pour les alerter. Pire encore, un constructeur a indiqué que seulement 50 % des propriétaires métropolitains sont joignables après consultation du SIV, et ce chiffre chute à 10 % en Martinique.
Pourquoi tant de véhicules échappent-ils aux rappels ?
Le rapport de l’IGEDD révèle que sur 100 voitures devant être rappelées, environ un tiers disparaît des radars. Certaines ont été exportées, d’autres détruites sans passer par le circuit officiel, et un grand nombre sont simplement introuvables. De plus, parmi les véhicules restants, entre 10 et 35 % des propriétaires ne vivent plus à l’adresse enregistrée. Ces données illustrent le sérieux problème de fiabilité du SIV, qui pénalise fortement les campagnes de rappel.
Comparaison avec l’Allemagne
L’écart avec l’Allemagne est frappant. Le KBA, l’équivalent allemand de l’IGEDD, parvient à rappeler la totalité des véhicules concernés en seulement 12 à 18 mois. La différence s’explique par un système de suivi beaucoup plus strict et efficace. Contrairement à la France, l’Allemagne ne repose pas uniquement sur le déclaratif et mobilise davantage de moyens humains. En France, seulement huit personnes travaillent au SSMVM (service de surveillance du marché des véhicules et des moteurs), un effectif largement insuffisant pour superviser un parc de 40 millions de véhicules légers.
Un manque de responsabilité des automobilistes
Les difficultés administratives ne sont pas les seules en cause. De nombreux propriétaires ne prennent pas l’initiative de se rendre en concession, même lorsqu’ils sont informés que leur voiture présente un risque grave. Certains minimisent le danger ou ne souhaitent pas immobiliser leur véhicule. Cette inertie complique considérablement le travail des constructeurs et des autorités.
Pour tenter d’inverser la tendance, l’IGEDD recommande au gouvernement d’interdire la vente de tout véhicule équipé d’un airbag Takata non remplacé. Deux leviers sont envisagés : le blocage de la carte grise tant que le problème n’est pas résolu et l’intégration de ce point au contrôle technique. Une telle mesure inciterait fortement les propriétaires à faire le nécessaire avant toute transaction.
Des professionnels désarmés face aux obstacles administratifs
Les concessionnaires se retrouvent également en difficulté. Lors d’un récent droit de réponse relayé par la presse, le directeur d’une concession BMW et Mini a affirmé qu’il avait tout tenté pour contacter les propriétaires des véhicules concernés. Mais l’accès au fichier SIV lui avait été refusé, rendant impossible un travail de suivi efficace. Cette situation illustre les nombreuses limites administratives qui freinent les campagnes de rappel.
Une urgence toujours d’actualité
Plusieurs années après le début de l’affaire Takata, la situation reste donc loin d’être réglée. Les airbags défectueux représentent un risque mortel et la lenteur des procédures inquiète les autorités. Alors que de nouvelles annonces du ministère des Transports sont attendues, la France doit impérativement renforcer son dispositif de suivi des véhicules et inciter les automobilistes à agir.
